
Aristote

(1) – L’œuvre d’Aristote a été mutilée sous la pression de l’Église
Tout ce qui précède Aristote, qui vivait au Ve siècle avant J.-C., est inaccessible au simple entendement. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles on a si abondamment commenté Aristote : tout d’abord, il est aisément compréhensible ; ensuite, on a guère progressé, après lui, en matière de conceptions philosophiques.
Il est intéressant de voir comment Aristote domine la philosophie du Moyen Âge, comment il ressurgit plus tard dans l’œuvre de Franz Brentano et encore à l’heure actuelle.
Sous la pression de l’Église, et non du christianisme, Aristote a été mutilé : il manque des parties essentielles de son œuvre, et l’on est tout naturellement amené à compenser ces mutilations par les apports de l’investigation occulte. Les fragments essentiels qui manquent dans l’œuvre d’Aristote concernaient l’âme humaine, l’expérience intérieure permettant d’accéder aux sources du mystère de l’âme.
Seulement, chaque fois qu’il aurait eu l’occasion de définir ses méthodes de méditation personnelle, il semble s’en être abstenu. Or, cette économie de mots ne tient pas à Aristote lui-même, mais à ses copistes ultérieurs, qui ont supprimé certains passages, ne les ont pas copiés et les ont dérobés à la postérité.
En réalité, Aristote voyait très clairement que lorsqu’on s’adonne à un véritable travail méditatif, lorsqu’on pratique des exercices, on parvient forcément à ressentir dans son âme la force de l’immortalité, car ce qui s’ouvre et s’éveille alors en soi est précisément immortel.
(2) – La pensée d’Aristote au sujet de l’âme
Aristote distingue deux parties constitutives de l’âme : l’une est liée au corps et reçoit les impressions du monde extérieur par la voie des sens ; celle-ci est le pur produit de l’évolution physique qui passe par les parents.
Il n’en est pas ainsi de la seconde partie de l’âme, qu’Aristote appelle l’âme pensante. Cette dernière participe, par son activité intellectuelle, à la vie spirituelle de l’univers, au noûs (ou raison), à la pensée du monde.
Elle est immatérielle et ne peut en aucun cas résulter de l’union des parents. Il faut que le divin intervienne dans la conception de tout être humain pour lui conférer la partie spirituelle de son âme, c’est-à-dire la partie pensante. C’est cette partie seulement qui subsiste après la mort, étant transplantée, pour ainsi dire, dans un autre monde, d’où elle contemplera, selon Aristote, pour l’éternité, le bien ou le mal qu’elle aura accompli sur terre.
Ainsi, pour Aristote, l’âme est créée ex nihilo au début de chaque vie embryonnaire, mais dès lors, elle est éternelle. Il admet la postexistence, mais il nie la préexistence. Cette opinion est demeurée le fondement de toute la philosophie chrétienne depuis le Moyen Âge.
